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(JPG) José Bové n’a pas encore les moyens de s’imposer à la gauche du PS

de Sylvia Zappi
Article publié le lundi 26 juin 2006.


Il s’est lancé seul, sans les troupes syndicales de la Confédération paysanne ou les altermondialistes. José Bové, qui s’est déclaré "prêt" à incarner la candidature unique de la gauche radicale à l’élection présidentielle de 2007, assure s’être décidé sous la pression du "désir unitaire". Pour "forcer le destin et faire bouger les lignes à gauche", explique-t-il. Et surtout pour "donner un coup d’accélérateur afin que le processus de désignation débouche sur un nom en septembre".
Il devra cependant faire d’abord bouger les lignes dans son propre camp. Dans la galaxie des formations situées à la gauche du Parti socialiste, l’engagement derrière José Bové n’a rien d’une évidence. Lui, assure que si les collectifs de campagne mis en place dans la foulée du lancement de l’appel en faveur d’un candidat unique de la gauche antilibérale choisissent quelqu’un d’autre, "il n’y a pas de problème". Mais, conscient qu’une course de vitesse s’est engagée, il tente de créer ses réseaux.
Les personnes sur lesquelles il peut compter ne sont pourtant pas légion. Si, dans les collectifs locaux, les militants associatifs, les syndicalistes ou les simples citoyens engagés dans la campagne du non au référendum de mai 2005 semblent de plus en plus nombreux à parier sur ses chances, sa garde rapprochée est modeste. "Je n’ai pas de noyau dur et homogène", reconnaît l’intéressé. Juste des "gens avec qui (il) travaille, qui (l)’ont poussé", et surtout qu’il écoute.
Dans ce petit cercle informel, on retrouve son ami François Dufour, avec qui il a milité lors des années de vaches maigres à la Confédération paysanne. Il était aussi à ses côtés dans le mouvement altermondialiste et lors de la campagne du référendum. "Si tu y vas, je te suis", lui a-t-il dit sans hésiter. Pour cet agriculteur de Basse-Normandie, "José, en éclaireur dénonçant la mondialisation, a su redonner espoir à plein de gens, notamment les petits".
Quant à la prise de distance de la "Conf’", qui a diffusé un communiqué expliquant qu’elle ne soutiendrait aucun candidat en 2007, même issu de ses rangs, elle est "normale", pour M. Dufour : "C’est un non-engagement qui est rappelé à chaque élection." Et une position de principe que rappelle Jean-Emile Sanchez, ancien porte-parole : "Le mouvement social doit rester un contre-pouvoir et ne pas entrer dans le jeu politique."

AMATEURISME
Autre proche, Denis Pingaud, publicitaire chez Euro-RSCG C & O. Lui s’est réservé la sphère médiatique : il conseille José Bové "à titre amical", lui corrige ses tribunes et négocie les interviews. Le militant altermondialiste Christophe Aguiton, syndicaliste de SUD, toujours membre de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR), que le leader paysan a maintes fois croisé dans les mobilisations des chômeurs ou dans les forums sociaux, a mis au service du syndicaliste paysan ses analyses de "tactique politique" et son regard sur des réseaux que José Bové connaît mal.
Moins intime, mais lui aussi écouté, le président de la Fondation Copernic, Yves Salesse. Un engagement personnel qu’il explique par le profil atypique du leader altermondialiste. "Il a été en taule pour ses convictions et sait ce que c’est de vivre dans la difficulté. Pour les gens à qui on s’adresse, c’est important", assure le conseiller d’Etat. A ses yeux, M. Bové a un autre atout pour la campagne à venir : il est sans attache partisane. "La très grande majorité des collectifs ne veulent pas d’un porte-parole de parti", explique-t-il.
Enfin, le leader paysan peut s’appuyer sur des réseaux plus politiques, engagés dans la campagne pour une candidature unitaire. Il y a les minoritaires de la gauche des Verts, autour de Francine Bavay, qui joue la "vigie" sur les apparitions militantes de M. Bové, les Alternatifs, parmi les plus enthousiastes, ou encore les communistes rénovateurs de Convergence citoyenne. Mais, au-delà, les structures politiques lui restent imperméables. "Il n’a pas envie de rentrer dans les batailles internes", confirme M. Aguiton. Devant cet amateurisme, ses amis ont convaincu le leader paysan de structurer une équipe de campagne plus solide. Une "task force ouverte à tous les volontaires" est en voie de constitution pour "l’aider à naviguer". Elle doit lui permettre de faire face aux équipes déjà constituées de Marie-George Buffet (PCF) ou d’Olivier Besancenot (LCR). L’un et l’autre peuvent s’appuyer sur leur direction nationale respective et des militants rodés. M. Bové rencontrera aussi, d’ici à la fin juin, les différents cercles politiques qui le soutiennent.
Le 29 juin, il sera à Marseille pour un meeting de lancement de la campagne de la gauche antilibérale organisé par le collectif local. Pour tous, il y a urgence que "José" s’investisse, s’il veut convaincre. "Depuis six mois, entre la construction de sa maison et ses rendez-vous internationaux, il est insaisissable. On ne peut plus faire dans l’improvisation", juge Mme Bavay.

Sylvia Zappi


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